Crise sanitaire, crise géopolitique, crise écologique, crise énergétique, crise du lien social… Vous en reprendrez bien une petite pour le dessert ? Depuis quelques années, la crise semble être devenue notre menu quotidien et notre horizon. L’actualité en est littéralement imprégnée, ce qui génère chez celles et ceux qui s’y intéressent des questions abyssales.
Comment, face à un monde qui semble se dérègler, ne pas céder à l’impuissance et à l’angoisse ? Comment, à son échelle, relever des défis aussi écrasants que le réchauffement climatique, la chute de la biodiversité, l’augmentation de la précarité, de la solitude ? Comment trouver la force de préparer le lendemain alors qu’aujourd’hui semble déjà compromis ?
Ces interrogations anxiogènes mais vitales ont un impact sur notre santé mentale. Elles se traduisent en partie par une détresse qui frappe toutes les générations, et particulièrement les jeunes. En juillet 2022, une enquête de l’institut CSA a révélé que 70% des étudiants français étaient en situation de mal-être : inquiets sur leur propre sort, inquiets sur l’avenir de la société, ils sont nombreux à présenter des signes dépressifs.
Il existe pourtant un remède à cette morosité ambiante, une réponse citoyenne aux crises que nous traversons : l’engagement bénévole.
Un levier d’engagement conscient, libre et volontaire qui permet aujourd’hui à des millions de personnes de tous les âges d’agir pour changer (un peu) le monde. Ces femmes et ces hommes font leur part au service des causes qui leur tiennent à cœur. Ils misent sur l’action qui devient leur meilleure arme face à l’angoisse, surtout lorsqu’elle s’inscrit dans un cadre collectif qui permet de démultiplier son efficacité et ses effets bénéfiques.
Ils sont déjà nombreuses et nombreux à avoir tenté ce pari. Après une chute conjoncturelle entre 2019 et 2022 liée au Covid, le nombre de Françaises et de Français engagés a augmenté en 2023 : 23% sont aujourd’hui bénévoles. L’enquête annuelle de France générosité met en évidence cette envie, en particulier chez les moins de 35 ans, de se mettre au service d’une cause.
Cette tendance est une chance pour notre société, pour le monde de demain, comme pour tous ceux et celles qui retrouvent du sens dans l’action. Elle doit être renforcée, encouragée et soutenue. Face à un monde en crise, nous avons plus que jamais besoin de bénévoles engagés, qui donnent ce qu’ils ont de plus précieux : leur temps et leur énergie.
Chez les Scouts et Guides de France, le bénévolat valorisé est la première des richesses : il représente près de 6 millions d’heures employées au service de la jeunesse, soit plus de 3400 équivalents à temps plein. 32 000 adultes s’engagent pour mener à bien la conversion écologique de l’association, développer l’accueil et l’inclusion, accompagner les jeunes sur les chemins de l’engagement solidaire, les éduquer à devenir des citoyens et citoyennes artisans de paix. Sans eux, ce sont 66 000 jeunes de 6 à 21 ans que nous ne pourrions pas accueillir et faire grandir.
La Loi du 1er juillet 1901 sur la liberté d’association est née au début d’un siècle plutôt généreux en crises. L’engagement bénévole a su traverser des guerres mondiales, des crises économiques historiques, des mutations profondes de sociétés. Complémentaire de l’action des pouvoirs publics, il a permis de mobiliser les énergies citoyennes au service de l’intérêt général. Au cœur de la crise sanitaire, ces engagements se sont révélés essentiels : les bénévoles de notre association et de la France entière se sont mobilisés pour fabriquer des masques, soutenir les équipes soignantes, les seniors, les services de protection de l’enfance…
L’expression de ces solidarités est une réponse aux défis qui se présentent à nous. Pour les personnes qui permettent à des centaines d’associations de fonctionner tous les jours, faisons plus. Faisons plus pour la liberté de s’engager. Faisons plus pour faciliter l’accès aux missions bénévoles. Faisons plus pour reconnaître ces engagements à leur juste valeur : comme composante essentielle de nos sociétés et force de résilience fondamentale.
Anne-Claire Bellay,
Déléguée générale des Scouts et Guides de France