20 novembre 2017
Quels objectifs ?
Les campagnes électorales de 2017 ont mis en avant la volonté partagée par de nombreux candidats de créer un temps obligatoire pour les jeunes. Si cette volonté de créer un service national semblait assez largement partagée, il n’y avait pas de consensus autour de ses objectifs et de son contour.
La principale question qui se pose donc aujourd’hui est bien celle des objectifs. Qu’est ce qui est visé par le projet de Service National Universel ? Apprendre à prendre les armes, former la jeunesse, la remettre dans le droit chemin, lui donner le goût de l’engagement … ?
Les Scouts et Guides de France font confiance en la jeunesse. « Notre mouvement reconnaît les forces d’indignation et d’enthousiasme propres à la jeunesse et les oriente vers des actes positifs, vers des responsabilités, vers des initiatives de justice et de paix. » (projet éducatif) Nous avons conscience de la force de l’engagement, de ce qu’il apporte humainement. Nous souhaitons à chaque jeune de connaître le bonheur de s’engager.
Pour autant, nous sommes très attachés au caractère volontaire de l’engagement. Un service, quand il devient obligatoire, n’est plus un service mais une corvée. Le SNU ne peut pas être confondu avec un dispositif de volontariat ni avec du bénévolat. Rendre l’engagement obligatoire serait profondément dévaloriser les formes d’engagement volontaire, en particulier l’engagement gratuit que constitue le bénévolat (25% des Français selon l’édition 2017 de « La France bénévole »)
Si le Service National Universel sert à unifier la jeunesse, forger un socle commun autour des valeurs de la République, permettre aux jeunes de se croiser, de se rencontrer, de former un collectif. Si le SNU permet de donner envie de s’engager, alors nous serons prêts à aider à sa mise en œuvre.
Nous ne sommes pas dans une démarche de prestation de service. Nous n’avons rien à vendre et nous n’avons pas de marché à prendre. Nos motivations pour la réussite du SNU sont bien uniquement la promotion de la jeunesse et des notions de service et d’engagement.
Une expérience commune à chaque Français et chaque Française
L’instruction est obligatoire et il ne viendrait à l’idée de personne de remettre cette obligation en cause. Pour autant, elle peut prendre plusieurs formes, adaptée à chacun.
Nous considérons que le service national universel peut être :
• Un espace de formation pour les jeunes sur la citoyenneté (les instances de la République, le fonctionnement de la République, les valeurs de la République…)
• Un lieu d’acquisition de compétences pour le bien commun : formation premiers secours (PSC1)
• Un espace de découverte et d’orientation : des métiers de la défense ; des possibilités d’engagement (bénévolat notamment, mais aussi des différents dispositifs de volontariat, militantisme politique, syndical…).
• Un espace pour expérimenter le vivre ensemble, la vie en équipe, l’égalité entre femmes et hommes. Un grand « team building national » de la jeunesse
• Une possibilité offerte de se mettre au service (ex : camp chantier en France ou à l’étranger)
• Un moyen pour identifier les jeunes en difficulté (tests de lecture, écriture, maîtrise du français, les bases de calcul / conditions de santé physique et mentale / conditions de logement / relations familiales / parcours scolaire ou professionnel)
• Un moyen de s’assurer que chaque jeune puisse bénéficier d’un examen médical complet
• En faire un évènement qui donne envie aux jeunes (et qui ne soit pas vécu comme une « corvée »). Ce passage doit être espéré et attendu par chacun.
• Concevoir ce moment avec hébergement, en impliquant les jeunes dans la vie quotidienne (repas, ménage, animations, etc.) pour que ce SNU soit un peu le leur (et leur donner envie de « raccrocher » avec la société)
Quelle forme ?
Le SNU pourrait comporter deux phases. La durée totale est moins importante à nos yeux que la continuité de la période. Un SNU discontinu sur plusieurs mois serait pour nous contre-productif puisque ne permettant pas de créer une communauté de vie. Notre expérience et notre pratique nous permettent d’affirmer que c’est un élément fondamental de réussite.
- une première partie de formation en adoptant autant que possible des méthodes actives (méthodes d’éducation populaire) pour apprendre à travers l’expérimentation (ne pas reproduire un schéma scolaire), en ménageant des temps pour un accompagnement individualisé (projet professionnel, projet personnel, orientation étudiante, suivi social éventuellement…)
- Une deuxième partie plus à la carte (même dans la durée) où seraient proposés des camps chantiers (avec partage des tâches quotidiennes, vie en équipe, etc. et des journées rythmées par un service rendu par exemple au Patrimoine de France, aux espaces naturels), voire un projet de solidarité internationale. Des séjours à travers la France même de loisirs qui permettraient à la fois de la mixité sociale, de la rencontre et de la découverte du pays.
Des écueils à éviter Faire porter à la jeunesse la responsabilité du manque d’engagement des plus âgés. Considérer que les difficultés traversées par le pays seraient du fait du manque d’engagement des plus jeunes ! Oublier que les Français et Françaises les plus engagés sont justement les plus jeunes et les personnes retraitées. Faire de la jeunesse une source de travailleurs gratuits pour des collectivités territoriales dont les ressources financières diminuent, ou pour remplacer les contrats aidés dans le secteur associatif. Ouvrir la porte aux dérogations : cela irait à l’encontre de l’universalité, de la mixité sociale. Si on peut « échapper » au SNU, cela signifie que c’est une contrainte. Lier le Service National Universel avec le Service Civique (ou tout autre dispositif de volontariat). Le premier doit pouvoir donner envie de faire le second mais il ne doit pas le remplacer. |